Gabin Jirodet

       La série suit plusieurs personnages qui se cherchent et tentent tant bien que mal de retrouver leurs places et d'accepter l'extraordinaire et incompréhensible événement qui s'est produit trois ans auparavant.
2% de la population mondiale a disparu de la surface de la Terre. Un instant, ils étaient là, celui-d'après, non.

De près ou de loin, les personnages de la série ont été touchés par cet événement qui a remis en perspective leurs vies...

Est-ce là l'oeuvre d'un ou de plusieurs dieux ? Une récompense ou un châtiment ? Est-ce le travail d'extraterrestres ? Est-ce un événement naturel ? Est-ce un accident humain ? Où sont-ils ? Vont-ils bien ? Pourquoi sont-ils partis ? Reviendront-ils un jour ?

Ces questions obsédantes en amènent une autre plus terrifiante encore qui vient cristalliser tout le désespoir des protagonistes de la série télévisée : pourquoi pas eux ?

Ces événements du 14 Octobre 2011 ont été renommés "The Sudden Departure", littéralement le "Départ  Soudain" et n'ont fait aucune distinction : hommes, femmes, transgenres, foetus, bébé, enfants, adolescents, adultes, vieillards, célibataires, en couple... Peu importe l'âge, le genre, les orientations politiques, sexuelles ou sociales, peu importe tout en fait, ces gens ont été pris.

Trois ans plus tard, on suit donc plusieurs personnages qui ont été laissés derrière et qui sont en proie à un profond malaise.

Beaucoup de ces personnages sont plein d'émotions refoulées et d'une colère et tristesse qu'ils ne parviennent pas à exprimer, comme le dit bien le personnage principal de la série Kevin Garvey : "Personne n'est prêt à se sentir mieux. Ils sont prêts à exploser." ("Nobody's ready to feel better. They're ready to fucking explode")

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       Avec un synopsis pareil, on pourrait s'attendre à ce que la série soit donc une enquête visant à découvrir ce qu'il s'est vraiment passé ce jour-là et pourtant, ce n'est pas le cas. Pas même en trame de fond. Subtilement, la série informe dès son début les spectateurs qu'il n'y aura probablement jamais de réponses. Après tout, cela fait trois ans que les scientifiques du monde entier cherchent et ne trouvent rien et la majorité des gens a finit par se convaincre petit à petit qu'ils étaient dans un endroit meilleur et ne posent plus de questions, de peur des réponses et de la peine.

       Ce qui frappe avec "The Leftovers", c'est la manière dont les personnages ont besoin des autres pour se reconstruire et surtout pour tenir. Un besoin d'autrui qui devient une forme de croyance sacrée, dans leurs égoïsmes et individualités, ils ont besoin d'être reconnus par autrui pour se sentir exister, et parfois cet autrui a disparu... Petit à petit la place de la foi augmente dans la série venant se superposer à l'espoir. Certains doutent, deviennent dévots, abandonnent tout espoir, se murent dans une résolution implacable et souvent bornée, se cherchent des sauveurs ou une forme de rédemption pour une quelconque faute... Tous ces gens se murent dans leur croyance de ce qui est "vrai" et tâchent de maintenir coûte que coûte, leurs illusions et bien souvent de se voir rejoint par d'autres comme pour devenir plus légitime. La frontière entre les points de vue et la place de la foi et du réel en vient d'ailleurs à se brouiller comme dans la saison 2 et évidemment comme dans la saison 3 dont le final frappant de simplicité et de retenu ne vient toujours pas poser de vérité absolue, mais vient joliment remettre en perspective la série.

       Ils ne sauront pas ce qui s'est passé ce fameux jour où tout a basculé. La série n'y répondra jamais. Ce qui compte le plus, ce n'est pas de savoir ce qu'il s'est passé, ça ne l'a jamais été malgré les propos des personnages, ce qui importe vraiment c'est de savoir ce que vont faire les personnages. Comment ils vivent, réussissent et échouent à se reconstruire et à se sentir à nouveau en vie et jusqu'où cela peut les mener.

Et s'ils n'obtiennent pas LES réponses, ils obtiennent parfois LEURS réponses.